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Le débat sur la réforme de l’Union économique et monétaire est capital

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header_icon_eplogo_print_newPervenche Berès, MEP and rapporteur of the Report “The review of the economic governance framework: stocktaking and challenges”.

 

 

Le débat sur la réforme de l’Union économique et monétaire que l’on nous promet depuis des années, ne peut être, une fois de plus, reporté : il est capital.

Personne ne peut se satisfaire de la situation économique actuelle de l’Union européenne et singulièrement de la zone euro. La reprise post-crise est trop lente et trop fragile, alors que la politique monétaire de la BCE est très accommodante et que le prix du pétrole est historiquement bas. D’autres parties du monde font beaucoup mieux que nous, d’abord les États-Unis.

Cette situation se développe dans un contexte où les défis et les sujets de tension entre les Etats membres se multiplient ces derniers mois, affaiblissant l’indispensable confiance mutuelle. Nous sommes passés tout près du “Grexit” et personne ne souhaite qu’un tel scenario se reproduise. L’afflux des réfugiés a fait ressortir ce qu’il y a de plus clivant entre les Etats de l’Union. David Cameron empêtre l’Union européenne dans un referendum qu’il a pourtant voulu et dont l’issue pourrait bien se retourner contre lui, son pays et l’Union toute entière.

L’impression que la crise n’en finira jamais, – sommet de la dernière chance après sommet de la dernière chance -, que l’Union navigue à vue et n’est pas en mesure de les protéger face aux désordres du monde, détournent les citoyens du projet européen et favorise les extrêmes.

Il est pourtant l’heure d’agir.

Le rapport dont j’avais la responsabilité voté en juin dernier par le Parlement européen voulait, en complétant, en communautarisant et en simplifiant l’UEM, remédier aux déséquilibres macroéconomiques qui mettent en péril sa viabilité et inventer des outils pour favoriser la convergence ou faire face aux futurs chocs. Combler aussi les divergences, les inégalités qui augmentent dans la zone euro à un rythme plus élevé que dans l’ensemble de l’UE. Il soulignait, le nécessaire ajustement auquel devait procéder les pays excédentaires et le besoin d’investissement créateur d’emplois et soutenant la transition écologique, d’association des partenaires sociaux et de responsabilité démocratique.

La voie était ainsi pavée pour une réforme en profondeur. C’est pourquoi la déception a été grande lorsque la Commission a fait connaitre les suites qu’elle donnait à ce rapport et au rapport des cinq présidents sur l’avenir de l’UEM, le 21 octobre dernier.

L’ambition est modeste au regard des défis qui assaillent l’Union et n’utilise pas toutes les marges de manœuvre existantes dans le cadre des Traités actuels. Elle reprend certes notre demande d’une recommandation spécifique pour la zone euro, mais elle ne propose aucune redéfinition de la priorité en matière d’investissement pour la zone euro ou de convergence réelle soutenue par une harmonisation fiscale et sociale, ainsi que par la mise en place d’une capacité budgétaire, qui font gravement défaut. Les principes élémentaires de la démocratie sont bafoués, puisque le Parlement européen est exclu du dispositif, aucune des initiatives prises ne relevant de la procédure de codécision. Saurait-on se contenter de la proposition d’une représentation extérieure de la zone par le président de l’Eurogroupe fixée à un horizon lointain, même si elle est souhaitable ? Ce paquet répond-il à l’urgence du moment ? Qu’en est-il de l’articulation et du profil de la phase deux de la réforme ?

Le chemin que nous avions proposé reposait sur un cadre de gouvernance amélioré par l’adoption d’un code de convergence démocratique légitimé. A cela, il faudrait que s’ajoute un véritable débat sur la situation économique de la zone euro que ponctuerait une recommandation zone euro rendue obligatoire et que le Parlement puisse traiter de ces questions au sein d’une instance spécifique.

Il faut également revoir le calibrage des réformes structurelles nécessaires puisque les mesures d’austérité ont conduit aux résultats médiocres que l’on connaît et que la stricte application des règles existantes ne suffira pas à corriger. Le moment est venu d’un changement en profondeur. Ce que nous voulons, c’est que la priorité soit mise sur les réformes écologiquement et socialement équilibrées, produisant des effets durables. Que soient mis en place de nouveaux instruments de solidarité et de convergence : un budget de la zone euro suffisamment important pour permettre la solidarité, absorber les chocs, soutenir l’investissement et la convergence. Que l’Union se dote de systèmes plus efficaces pour traquer et empêcher l’évasion fiscale qui prive les Etats de ressources. Que l’on brise enfin le tabou de la dette : des mécanismes d’allégement des dettes souveraines doivent être rendus possibles. Que l’on achève également l’Union bancaire avec l’instauration d’un système européen de garantie des dépôts et avant de créer l’Union des marchés des capitaux. Mais il faut être vigilant. Le lancement de ce nouveau chantier d’une Union des marchés des capitaux est présenté par ses avocats comme le moyen de permettre la reprise de l’économie européenne grâce à une meilleure mobilisation de l’épargne privée disponible. Cela ne peut pas et ne doit pas être conçu comme un moyen de retarder la nécessaire mise en place d’un budget de la zone euro. Celui ci est indispensable pour assurer la solidité même d’une Union des marchés des capitaux et la reprise de l’investissement dans un contexte de taux d’intérêt bas et d’absence de confiance.

C’est dans l’épreuve que l’Union a toujours trouvé un sursaut. Comme la crise grecque a -toute proportion gardée- relancé le moteur fédéral de l’Union, le referendum britannique peut servir d’élément déclencheur de la relance du projet européen. L’Union économique et monétaire est au cœur du projet européen. Les États membres de la zone euro doivent dire ouvertement ce qu’ils veulent faire ensemble. La survie de la zone euro est à ce prix.